top of page
  • Photo du rédacteurPittet Dominique

Dégustation : Vaud contre le reste du monde


L'association des Epicurvins, en partenariat avec la brasserie de Montbenon, ont préparé un événement remarquable ce dimanche soir 7 octobre 2018. Ils nous ont organisé un repas (fantastique), avec comme vins, un ou plusieurs vins du monde face à un vaudois, dans un registre monocépage en dégustation à l'aveugle. Et nous avons même eu la chance d'avoir les différents producteurs vaudois sélectionnés présents pour nous parler de leur champion.

L'association des Epicurvins est un club de dégustation créé il y a deux ans par des passionnés de la région. Le président, Mathieu Blanc, et les membres du comité, mettent en place annuellement environ six événements de grande classe. C'est un paradis pour les amoureux de vins et de bonne chair, dont je fais partie. Et c'est avec un grand plaisir que de nouveaux membres sont accueillis.

Pour revenir à cette superbe soirée, je vais vous décrire les plats et les vins, en espérant vous donner envie de nous rejoindre.

La soirée commence par un amuse-bouche, composé de stracciatella de Cuarnens et de betteraves Chioggia. Cela ressemble à un petit feuilleté avec de la betterave et une crème, très fine. C'est accompagné par un chasselas de la Ville de Lausanne, Abbaye du Mont, La planta, un Mont-sur-Rolle. Le vin est bien tendu, aérien, plutôt léger et floral. L'accord est tout à fait correct, rien ne prend vraiment le dessus, et les goûts se marient bien.

La première entrée (j'aurais dû photographier les plats, je n'ai pas l'habitude, promis la prochaine fois) est composée de bolets du Jura, poivre Tilfda et courge rôtie, une vraie réussite. Pour accompagner, le cépage choisi est le sauvignon blanc. Le profil aromatique des trois verres est assez disparate. Le premier est vraiment sur le pamplemousse, le deuxième est très fin, floral, minéral et le troisième est plus intense, avec une note de vanille et d'agrumes. À l'aveugle, je dirai que le deuxième est un Sancerre, le premier peut-être un de Nouvelle-Zélande, c'est en tout cas très typé, et donc le troisième un vaudois. Bingo, le Sancerre est un "Chêne Marchand 2016" du domaine Vincent Pinard, un des meilleurs de l'appellation. Le NZ est un Cloudy Bay, Marlborough 2017 et le vaudois vient du domaine Louis Bovard de Cully. C'est un Ribex de 2017. C'est clairement le Sancerre qui tire son épingle du jeu dans ce trio, par sa finesse, sa profondeur aromatique et sa minéralité. Je ne suis pas fan du Néo-zélandais et le vaudois est un peu trop boisé à mon goût (suis sensible à ça). L'accord avec le plat est excellent, particulièrement avec le Sancerre, qui relève le plat tout en gardant son caractère.

Deuxième entrée, cette fois nous avons droit à de l'écrevisse et féra, de la pêcherie d'Ouchy, avec une bisque crémeuse. Le plat est fantastique, onctueux, savoureux et bien relevé. Le compagnon de ces bols sera choisi parmi des pinots noirs, deux pour être exact. Le premier a un profil très ferme, droit, sur les fruits noirs et les épices, de la puissance, de la minéralité et une belle longueur. Le deuxième au nez, révèle immédiatement son origine bourguignonne, un mélange de fruits rouges, de terre chaude, d'épices douces, avec une finesse et une belle harmonie. Et effectivement, c'est un Chambolle-Musigny 2011, Vieilles vignes, du domaine Hubert Lignier. Le vaudois nous vient de La Côte, domaine Henri Cruchon, Raissenaz 2015. Et là, il n'y a pas photo, le vaudois grâce à sa puissance l'emporte dans le jeu des accords. Il arrive à contrebalancer la bisque pourtant très épicée. Le bourgogne, lui, est emporté par le plat. Par contre seul, il l'emporte haut la main, grâce à la finesse, sa légèreté et son harmonie. Match nul ?

Le premier plat de résistance arrive. Octobre aidant, c'est un plat de chasse, filet de chevreuil au poivre de Tasmanie, servi avec une superbe présentation, viande saignante, choux rouges, châtaigne et purée de panais et topinambour. Pour un gibier, rien ne vaut une syrah. Et c'est donc trois vins qui nous sont présentés. En discutant avant le service, je plaisantai sur le fait que j'aurai mis une vallée du Rhône et une Valaisanne en compétition avec la Vaudoise. Et à voir les profils que nous avons, je ne me suis peut-être pas trompé. Le premier verre est très fin, minéral, un fruit très aromatique, mature, bien corsé et assez long. Le deuxième est plus boisé, avec une touche florale, peut-être plus vieux. Le troisième ressemble un peu au premier, avec une charpente plus costaude et un fruit plus frais et plus complexe. Cette fois, c'est plus compliqué, et j'hésite beaucoup. Finalement, la réponse vient avant de pouvoir me décider, et nous avons en premier, à ma surprise, un vaudois, une syrah de Saint-Saphorin 2015 de la Cave des Rois à Villeneuve, 15 mois d'élevage, sans filtration, sur des vignes plantées en 1986. Le deuxième verre est le Valaisan, représenté par la Cave Jean Maret de Fully, Syrah Barrique 2014, sur des vignes de 40 ans, 12 mois d'élevage en barrique. Enfin, le dernier est un Crozes-Ermitage, Michel Chapoutier, Les Varonniers 2013, sur des vignes de 60 ans. Le vaudois et le rhodanien s'en sortent très bien, j'ai un peu plus de peine avec la barrique valaisanne, un peu trop marquée à mon goût. J'ai même un petit faible pour la syrah de Saint-Saphorin, peut-être à cause du millésime qui lui donne plus de maturité. Quoi qu'il en soit, le niveau ici est excellent.

Le deuxième plat de viande, toujours sur du gibier, est un civet de cerf aux airelles et cornes d'abondance, spätzlis à la farine de Fabien Chappuis, le tout étant servi sous forme de ragoût dans un bol. La viande ici est beaucoup plus sauvage, et c'est le merlot qui a été choisi pour l'affronter. Trois verres, le premier est frais, fruité, plus sur le cépage, rond et onctueux, le deuxième est plus boisé, tannique, corsé, avec plus de chaleur dans le fruit, alors que le troisième est un peu fermé, très très tannique, puissant, jeune en un mot. Pour le merlot, j'aurai dit un Tessinois et un Bordelais, avec Pomerol, pour accompagner notre vaudois. Et si je donne le troisième aux Français, j'hésite sur les deux premiers. Perdu cette fois, le premier est un vaudois, Cave de la Côte, Morges, avec un Merlot Réserve 2015, élevé pour un tiers en barrique neuve. Le deuxième est un Toscan, Domaine Fertuna, de Maremma, le Messiio 2013. Le dernier est bien un Pomerol, Château La Cabanne, 2015, qui pourra encore nous émerveiller dans une dizaine d'années. À noter que ce Pomerol n'a que 95% de merlot, le seul 100% étant un peu hors de prix (Petrus). Ici, le merlot vaudois représentait la finesse face à la force, difficile de faire son choix, le tout s'accordant très bien.

On passe au fromage, avec un vacherin Mont d'Or de Serge André, accompagné d'un chutney de pruneaux de la ferme du Taulard avec du pain aux noix de Romainmôtier. Les fromages sont toujours difficiles à accorder avec un vin rouge, mais je pense que le gamay pourra faire un bon partenaire. Quand on pense gamay, le Beaujolais nous vient de suite à l'esprit, et le premier verre versé confirme les soupçons. Un profil fruité, assez léger, mais avec une bonne trame. Le deuxième verre est beaucoup plus dense, voir âgé, avec un profil de fruit plus mûr, et une structure plus importante. Je connais ce vin et effectivement c'est un vaudois, de la Maison du Moulin à Coinsins, Gamay Violette des Prés, 2013. Le premier est bien un cru du Beaujolais, Morgon pour être exact, domaine Daniel Bouland, Corcelette 2017. L'accord avec le Mont d'Or est sympathique, car celui-ci est très crémeux, avec un goût assez léger, le chutney apportant une cohérence avec le vin et les deux sont très agréables. J'ai une préférence pour le vaudois, au profil plus concentré et tendu, avec une meilleure longueur.

La brigade de cuisine reçoit un tonnerre d'applaudissements et nous les remercions encore pour cette cuisine vraiment savoureuse. Il faut aussi remercier les serveurs, pour l'accueil, le timing, le service parfait et leur bonne humeur. La soirée ne saurait être une réussite sans tout cela. On peut encore mentionner le cadre enchanteur de la brasserie de Montbenon, cette pièce sous dôme est vraiment agréable, pas trop bruyante malgré le monde, avec une belle vue et de l'espace. Et on n'oublie pas la terrasse pour l'été.

En fin de repas, le chef nous a préparé une mousse arabica, chocolat noir pur origine grué de cacao. Une crème très légère, avec un côté moka soutenue par du chocolat noir, qui est accompagnée par une spécialité pour le moins inattendue. Un vin mousseux, ressemblant à un blanc de blancs, assez sur les agrumes, une touche de minéralité, bien tendu, qui n'est pas facile à replacer. Et pour cause, il s'agit d'une Arvine Extra-brut 2013 du domaine Phusis, de la Sarraz, un vin atypique d'une cave qui l'est tout autant.


En résumé, encore une fois une très belle soirée que nous avons vécue là. Vous pouvez retrouvez les anciennes sorties, soit sur le site des Epicurvins ou sur leur page Facebook. Signalons encore que la soirée était ouverte à tous, pour un prix allant de 155 Frs à 185 Frs selon que l'on soit membre ou pas.

Je remercie le comité, la brasserie et les vignerons présents pour ce moment de partage et de découverte.

21 vues0 commentaire
bottom of page